Le crapaud dérange

TERMINAL METHANIER : Le pélobate cultripède ? Entendez une variété de crapaud, bien implantée sur la pointe du Médoc, en Gironde, notamment dans l’enceinte du Grand Port maritime de Bordeaux (1).


L’espèce est protégée, inscrite à l’annexe 4 de la directive 92/43 de l’Union européenne, dite Habitat Faune-Flore qui garantit (en principe) la pérennité de son espèce. La petite bête est en train de devenir le nouveau porte-étendard d’une partie de l’opposition au projet de terminal méthanier élaboré par la société 4Gas au droit des côtes royannaises.

Le fondateur du collectif Estuaire 3317, Eric Poder, écologiste convaincu mais surtout farouche opposant au projet Pégaz, brandit aujourd’hui les textes législatifs protégeant le pélobate. « L’arrêté du 19 novembre 2007 fixe la protection de cette variété de crapaud en droit français. La destruction, l’altération ou la dégradation des sites de reproduction et des aires de repos des animaux cités est interdite ! Le projet méthanier doit être définitivement repoussé. »

L’argument écologique

Les associations menant des recherches sur le patrimoine naturel de la pointe du Médoc n’en pensent pas moins. « Nous sommes opposés à tout projet d’implantation sur cette partie de terrain hélas constructible », explique Christophe Coïc, directeur de l’association girondine Cistude Nature. « Durant des années, les espèces étaient protégées, mais pas leur habitat. Les choses ont heureusement changé. Le pélobate est présent dans la zone Médoc, à la pointe et dans la dune. Cette variété est inféodée au milieu sableux. C’est une population viable, pas une population relique. Une implantation physique de type industriel telle que le port méthanier peut mettre en danger cette population. Il en est de même des infrastructures routières ou du gazoduc. »

L’homme est conscient des tentatives d’instrumentalisation de l’argument écologique par les lobbies pro et antiméthaniers. Il maintient cependant le cap. « Le Médoc est une grande entité territoriale non morcelée qu’il faut conserver. Malgré les lois européennes et nationales, le territoire métropolitain perd en biodiversité. Le Grenelle de l’environnement prévoit d’enrayer cette perte. Mais l’inventaire en Aquitaine n’est même pas finalisé ! » Dans une étude commandée par 4Gas, rendue publique durant la procédure de débat public (2), la présence du pélobate a bien été prise en compte. Son déplacement a été proposé.

« Ce texte reprend des données vieilles de dix ans ! » s’emporte Eric Poder. « Pour le déplacer, il faudrait que ce soit un dossier déclaré d’intérêt public », reprend Jean-Marc Thirion, directeur de l’association nationale Obios et spécialiste du pélobate. « Le cadre de la loi est précis. Et du point de vue scientifique, personne n’a suffisamment de recul pour prédire l’impact d’un tel déplacement sur la population. »

« Ils ont tous crevé »

Ou plutôt si. Jacky Bonnemains, président de l’association Robin des Bois, qui soutient Estuaire 3317, a vécu une situation similaire dans le nord de la France. « Au Havre, en 1999. Les crapauds n’étaient pas alors protégés. La population a été déplacée. Ils ont tous crevé… »

(1) Anciennement Port autonome de Bordeaux. (2) Étude consultable sur www.debatpublic-leverdon.org. La société 4Gas, sollicitée par nos soins, n’avait pas repris contact à l’heure où nous écrivions ces lignes. Source

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